« Si la civilisation multiplie les besoins, elle multiplie aussi les sources du travail et les moyens de vivre ; mais il faut convenir que sous ce rapport il lui reste encore beaucoup à faire ; quand elle aura accompli son œuvre, personne ne devra pouvoir dire qu’il manque du nécessaire, si ce n’est par sa faute. Le malheur, pour beaucoup, est qu’ils s’engagent dans une voie qui n’est pas celle que la nature leur a tracée ; c’est alors que l’intelligence pour réussir leur fait défaut. Il y a place pour tout le monde au soleil, mais c’est à la condition d’y prendre la sienne, et non celle des autres. La nature ne saurait être responsable des vices de l’organisation sociale et des suites de l’ambition et de l’amour-propre.
Il faudrait être aveugle cependant pour ne pas reconnaître le progrès qui s’est accompli sous ce rapport chez les peuples les plus avancés. Grâce aux louables efforts que la philanthropie et la science réunies ne cessent de faire pour l’amélioration de l’état matériel des hommes, et malgré l’accroissement incessant des populations, l’insuffisance de la production est atténuée, en grand partie du moins, et les années les plus calamiteuses n’ont rien de comparable à ce qu’elles étaient naguère ; l’hygiène publique, cet élément si essentiel de la force et de la santé, inconnu de nos pères, est l’objet d’une sollicitude éclairée ; l’infortune et la souffrance trouvent des lieux de refuge ; partout la science est mise à contribution pour accroître le bien-être. Est-ce à dire que l’on ait atteint la perfection ? Oh ! certes, non ; mais ce qui s’est fait donne la mesure de ce qui peut se faire avec la persévérance, si l’homme est assez sage pour chercher son bonheur dans les choses positives et sérieuses, et non dans des utopies qui le reculent au lieu de l’avancer. » |